mercredi 30 janvier 2008

Alors Kerviel ! Cochon, dindon, paillasse ou millionnaire ?

"Ils veulent tous trouver Kerviel", titrait encore, mardi 29 janvier, le site de 20 Minutes.
Et de nous expliquer : « La chasse à l'homme continue. Plusieurs jours après que le scandale de la Société générale a éclaté, aucun média n'a réussi à entrer en contact directement avec Jérôme Kerviel, le courtier en cause dans l'affaire. »

Et c’est vrai que les médias pratiquent la chasse à l’homme depuis quelques jours à propos des 5 milliards d’euros perdus par la Société générale.

Prenons, par exemple, 20Minutes.fr :

24 janvier 9h05 : « Fraude à la Société générale: le courtier en fuite? »

FBI, porté disparu. Jack Malone est aux manettes. Et Jack, c'est un pitbull. Il ne lâche rien:


24 janvier 17h02 (on l’a identifié): « Jérôme Kerviel, le courtier par qui la Société Générale a perdu 4,9 milliards d'euros ».
25 janvier 23h15 : « Des policiers chez Jérôme Kerviel »
26 janvier 14h30 : « Jérôme Kerviel en garde à vue à la brigade financière »
27 janvier 10h18 : « Société Générale: le courtier Jérôme Kerviel toujours en garde à vue »
28 janvier 8h33 : « Société Générale: fin de la garde à vue de Jérôme Kerviel qui pourrait être présenté au Parquet »
28 janvier 13h48 : « Société Générale: ouverture d'information judiciaire, Kerviel déféré au parquet »
28 janvier 19h48 : « Société générale: Kerviel mis en examen notamment pour «abus de confiance»
29 janvier 18h14 : « Ils veulent tous trouver Kerviel. »
29 janvier 20h42 : « Qu’est-ce qui coûte de 2,3 millions d’euros par heure aux Français ? ». Jérôme Kerv.. non je plaisante. L’article est sur les jeux de loto.

Mais bon, quand même. On joue tous au loto. Voilà ce qu’a fait ce trader malheureux. Sauf que, quand même, on se questionne, s’interpelle. A-t-il agi seul ? Le Président de la Société générale n’est-il pas responsable. Nos-chers-gouvernants ont été prompts à dénoncer les responsabilités du président. « Il doit démissionner » disent-ils tous en cœur du PS à l’UMP.

Faudrait pas que le pékin moyen croie que c’est le système économique qui est responsable… On donne donc en pâture le trader qui pourtant travaillait plus pour gagner plus et son directeur, ce requin de la finance (mal vu de toute façon avec sa probable retraite chapeau et son parachute doré).

Oh la la.

Quand on regarde les JT, quand on lit la presse, quand on écoute la radio, que cela paraît complexe. Ces montages financiers, ses contrôles boursiers, cette informatique pleine de codes secrets détournés.

Pourtant. Pourtant…

Si on relit nos classiques. Balzac, par exemple. En 1837. Il y a 170 ans. Presque deux siècles.César Birotteau, histoire de la grandeur et de la décadence d’un homme, marchand parfumeur, adjoint au maire, chevalier de la légion d’honneur, qui voulait faire fortune, en plus, spécule sur de l’immobilier et se gaufre. Ruiné. Ratatiné. Il va voir un banquier, qui lui explique tout.

Lisez. C’est Kerviel, Bouton. Mais surtout, « ce qui est en cause ici, … c’est un système… Ce système porte un nom : c’est le capitalisme. L’œuvre de Balzac, entre autres choses, c’est aussi la description de la montée du capitalisme », disait Félicien Marceau.

Un Classique (poche Folio, 7 euros), p. 308-309:

M. Claperon (le loup) : « Une affaire exige le concours de tant de capacités ! Mettez vous avec nous dans les affaires ! Ne carottez pas avec des pots de pommade et des peignes : mauvais ! mauvais ! Tondez le public, entrez dans la Spéculation.
César Birotteau (l’agneau) : La spéculation ? dit le parfumeur, quel est ce commerce ?
M. Claperon : C’est le commerce abstrait, repris Claperon, un commerce qui restera secret pendant une dizaine d’années encore, au dire du grand Nucingen, le Napoléon de la finance, et par lequel un homme embrasse les totalités des chiffres, écrème les revenus avant qu’ils n’existent, une conception gigantesque, une façon de mettre l’espérance en coupes réglées, enfin une nouvelle Cabale ! Nous ne sommes encore que dix ou douze têtes fortes initiées aux secrets cabalistiques de ces magnifiques combinaisons.

César ouvrit les yeux et les oreilles en essayant de comprendre cette phraséologie composite.

M. Claperon : Ecoutez, dit Claperon après une pause, de semblables coups veulent des hommes. Il y a l’homme à idées qui n’a pas le sou, comme tous les gens à idées. Ces gens là pensent et dépensent, sans faire attention à rien. Figure-vous un cochon qui vague dans un bois à truffes ! Il est suivi par un gaillard, l’homme d’argent, qui attend le grognement excité par la trouvaille. Quand l’homme à idées a rencontré quelque bonne affaire, l’homme d’argent lui donne alors une tape sur l’épaule et lui dit : « Qu’est-ce que c’est que ça ? Vous vous mettez dans la gueule d’un four, mon brave, vous n’avez pas les reins assez forts ; voilà mille francs, et laissez-moi mettre en scène cette affaire. » Bon ! le Banquier convoque alors les industriels. Mes amis, à l’ouvrage ! des prospectus ! la bague à mort ! On prend des cors de chasse et on crie à son de trompe : « Cent mille francs pour cinq sous ! ou cinq sous pour cent mille francs, des mines d’or, des mines de charbon. » Enfin tout l’esbroufe du commerce. On achète l’avis de hommes de sciences ou d’art, la parade se déploie, le public entre, il en a pour son argent, la recette est dans les mains. Le cochon est chambré sous son toit avec des pommes de terre, et les autres se chafriolent dans les billets de banque. Voilà, mon cher monsieur. Entrez dans les affaires. Que voulez-vous être ? cochon, dindon, paillasse ou millionnaire ? Réfléchissez à ceci : je vous ai formulé la théorie des emprunts modernes. Venez me voir, vous trouverez un bon garçon toujours jovial. La jovialité française, grave et légère tout à la fois, ne nuit pas aux affaires, au contraire ! Des hommes qui trinquent sont bien faits pour se comprendre ! Allons ! encore un verre de vin de Champagne ? »

Un Classique. On le transpose à notre affaire. Tout s’éclaire.

Pourquoi on ne lit plus Balzac à l’école ?

Max.

lundi 28 janvier 2008

la figure du sans papier...


















... ou comment la politique disparaît dans l'abstraction.

Jeudi dernier, le papa d'une petite camarade de classe de ma fille, 4 ans et demi, est arrêté par la police, à son domicile. Il est sans-papiers. Il est conduit au centre de rétention de Vincennes et passe devant un juge qui lui notifie son expulsion pour un jour proche (ce lundi peut-être).

Samedi, une petite manifestation est organisée, par l'école et le réseau RESF, dans le quartier pour essayer de mobiliser un peu les habitants. Nous sommes une trentaine qui déambulons dans les rues dans ce qui ressemble à une sorte d'indifférence ou de renoncement ou de peur. C'est jour de marché. Les rues sont pleines mais elles sont vides.

Je m'interroge.

Rentrant chez moi, je reprend le livre de David Hochney [1] dans lequel je me suis plongé ce week end. J'y trouve une réponse provisoire. "Avant Einstein, écrit-il, le temps et l'espace étaient considérés comme des concepts distincts, comme des absolus qui auraient toujours existé. Pour Einstein, ces notions ne sont pas des absolus et elles dépendent en grande partie de l'observateur. Par voie de conséquence, la notion de réalité partagée a considérablement reculé. Il devenait évident que nous voyons tous quelque chose d'un peu différent".

Pour nos sociétés contemporaines dans lesquelles les individus s'autonomisent, les populations se déplacent, tout devient abstraction. Il n'y a plus un point fixe à partir duquel nous regardons tous ensemble vers l'horizon. La perspective disparaît. La "notion de réalité partagée" recule.

Nous manifestons dans des tunnels. Au dessus, d'autres, se taillent des boulevards.

Nous avons besoin de voir neuf. Mais comment ?

miossec - le stade de la résistance

Max.


[1] David Hochney, Ma façon de voir, Thames & Hudson, 1993


Nota bene: collage librement inspiré des oeuvres de David Hochney et Kara Walker

samedi 26 janvier 2008

week end

David Hochney, Pearblossom Highway #2, 1986.

vendredi 25 janvier 2008

Boutin / Amara: le plan Grand Froid...

Christine Boutentrain et Fadela Caméra forment un beau duo. Certes plus proche de Laurel et Hardy que d'une ministre et sa secrétaire d'Etat. Mais quand même, le spectacle est drôlissime. Problème. Une fois passé le rire des premières secondes, on se crispe. Leur vaine agitation est l'exemple même du cynisme du régime qui s'impose chaque jour un peu plus à nous.

Petite chronologie


18 décembre 2006, Charleville Mézière, discours de Nicolas Sarkozy "Pour la France qui souffre": "A quoi sert-il de proclamer le droit au logement, le droit à l’hébergement, l’égalité de l’homme et de la femme, le droit de scolariser son enfant handicapé, le droit au logement étudiant… Si l’on ne construit pas assez pour résorber le déséquilibre entre l’offre et la demande ? "
Mais encore: "Je propose d’en finir avec le renoncement.Je propose d’en finir avec l’hypocrisie".
Mais enfin ! :"Je veux que d’ici dix ans les 700 000 logements manquants pour résorber la crise du logement aient été construits".


6 mai 2007: Nicolas Sarkozy est élu président de la République française avec 53,06% des voix (49,8% dans la France qui souffre à Charleville Mézière).

18 mai 2007: Le gouvernement Fillon est nommé: Au Ministère du logement de la ville est nommée Christine Boutentrain et Fadela Amara devient sa colocataire chargée de la ville. Celle-ci assure que "cela va bien se passer" avec "une personne qu'elle a déjà rencontrée, qui a beaucoup de coeur". "On va s'entendre sur beaucoup de choses, notamment sur la question de vouloir transformer les quartiers". Elle conclut: "C'est un beau mariage, même s'il y aura sans doute, comme dans tous les mariages, de petites disputes."

17-27 septembre 2007: Le Ministère du logement se délocalise 10 jours Place Bellecour à Lyon. Coût total de l'opération: 250 000 euros.

25 septembre 2007: Suite à une polémique entre la Minstre du logement et Augustin Legrand (Les Enfants de Don Quichotte sur le nombre de SDF et de places d'hébergement), Christine Boutentrain propose à son contradicteur d'entrée dans son cabinet ministériel. Il refuse.

16 novembre 2007: Jean-Paul Bolufer, directeur de cabinet de la Ministre du Logement, invité de l'émission "Du grain à moudre" sur France Culture, déclare: "Je voudrai insister sur l'absence de rotation dans le parc HLM. Aujourd'hui, se trouvent, pour parler très vite, dans le parc HLM des gens qui ne devraient pas y être, et se trouvent dans la rue, des campings, des gens qui devraient y être et notamment parmi les jeunes et parmi les ménages les plus modestes. Je considère que c'est un véritable scandale. Et, nous sommes en train de préparer un texte pour mettre en place de véritables surloyers pour ceux qui profitent indûment du parc HLM et qui, bénéficiant de leur rente de situation, se font construire, par ailleurs, peut-être des résidences secondaires".

décembre 2007: Déclenchement du Plan Grand Froid. les ennuis commencent pour les sans-abris, les "couche dehors" comme disait l'Abbé, mais aussi pour Christine Boutentrain...

17 décembre: la très médiatique Association Les enfants de Don Quichotte déclare "Force est de constater que tous les jours, des personnes restent sans hébergement parce qu'il n'y a plus de place ou les places qu'on leur propose sont indignes. Notre projet est d'installer un campement 'refuge', auquel des associations auraient pu apporter leur soutien logistique et humain. (...) Alors que 27 100 places devaient être créées ou transformées en 2007, moins de 14 000 le seront". Christine Boutentrain avoue elle même "le problème, ce sont les maisons relais. Nous en avions promis 13 000, nous en avons réalisés 6 000". (le JDD du 17 décembre)
F. Fillon prend en main le dossier. Il annonce aux associations qu'il ne tolèrera aucun campement de tentes, tout en leur certifiant la signature d'un contrat (avec des buts précis) le 15 janvier. Rendez-vous est donc pris...

19 décembre 2007: le Canard Enchaîné dévoile que M. Jean Claude Bolufer, directeur de cabinet de Madame Boutentrain, occupe, à Paris, un appartement HLM de 190 m2 pour un loyer très inférieur aux prix du marché. Il démissionne.

8 janvier 2008: Nicolas présente ses voeux à la presse et annonce le report au mois de février de l'annonce du plan banlieue préparé par Fadela Caméra.

10 janvier 2008: Christine Boutentrain raconte dans Paris Match: Fadela Caméra "m'a été imposée comme secrétaire d'Etat, assurait la ministre du logement et de la ville. Les dix premières secondes de stupeur passées, j'ai dit : Je veux que ça marche ."

14 janvier 2008: Dans La Croix, elle déclare qu'elle ne "croit pas en un plan uniquement centré sur les banlieues", mais en une politique de la ville plus globale. (le Monde du 15 janvier)

15 janvier 2008: Le fameux contrat promis par F. Fillon est au point mort. 20 minutes explique dans son édition du jour que "le dossier des sans-abris est toujours à la rue. Pinaillages en haut lieu. Le contrat qui devait être signé [ce jour-là] entre le gouvernement et les associations d'aide aux sans abris ayant été abandonné vendredi, chaque partie en est réduite à transmettre sa liste de propositions à l'autre pour tenter de sortir de la rue les 200 000 SDF".
Pendant ce temps, Christine Boutentrain invente la maison à 15 euros par jour. Le dispositif doit succéder à la maison à 100 000 euros, lancée en 2005 par Jean-Louis Borloo. 20 minutes nous rappelle que la maison Borloo "avait généré moins de 500 constructions". La maison à 15 euros par jour serait payable sur "20 à 25 ans à raison de 450 euros par mois".
J'ai fait le calcul: 450 x 12 x 20 = 108 000 euros. Soit plus chère que la maison Borloo. Hmm hmm

21 janvier 2008: Nicolas Sarkozy, que Fadela Caméra attendait pourtant à Vaulx en Velin le lendemain, choisit plutôt de se rendre à Sartrouville pour y évoquer le futur Plan Banlieue et en donner la philosophie: "la vie, ce n'est pas glander". Le "plan banlieues" devient officiellement le "plan anti-glandouille".

22 janvier 2008: Christine Boutentrain et Fadéla Caméra se retrouvent, dans un Vaulx en Velin dont le centre ville est interdit à ses habitants, pour faire la présentation des grandes lignes du plan. La ministre coupe l'herbe sous le pied de sa Secrétaire d'Etat en le ramenant à un "plan égalité des chances". Nicolas Sarkozy reprend le dossier en main et annoncera les mesures définitives le 8 février. (libélyon du 22 janvier)

22 janvier 2008: Hommage à l'abbé Pierre disparu il y a un an tout juste. Quasiment toutes les rédactions se posent la même question: "Qui pour succéder à l'Abbé Pierre?"

De toute évidence,
Personne.



Nota bene: le collage a été réalisé à partir de l'affiche publicitaire d'un grand magasin parisien. Saurez vous trouver lequel ?


mercredi 23 janvier 2008

PS: n'en restera-t-il que des maux?

La bêtise, hélas, n'est pas que de droite. Elle peut aussi être de gauche.


Une campagne de publicité dans le métro parisien de l'IFAW sur l'extinction de certaines espèces animales a attiré mon attention. On y voit, sur certaines affiches, sur un fond de paysage de savane, le mot éléphant dont le graphisme prend la forme de l'animal. Au bas, une question sonne comme un dernier avertissement avant qu'il ne soit trop tard: "N'en restera-t-il que des mots?"

Eléphants, extinction des espèces. Il n'en fallait pas plus à mon esprit marabouté pour me laisser embarquer pour un voyage dans le temps et l'exPS...

On connait depuis longtemps les causes qui font que d'ici très peu de temps les éléphants risquent de ne plus être pour nous que des géants que nous irons voir au musée de notre déraison. Il en est d'autres, sans doute moins indispensables à nos écosystèmes, dont on nous promet chaque jour l'extinction prochaine. Je veux parler, biensûr du parti socialiste.Aucune ONG se mobilise et tous les indices sont au rouge. Les déclarations les plus récentes des chefs du troupeau sont là pour nous le démontrer.

Petite revue de détails.

La surpopulation humaine pousse à la déforestation: Le monde du 14 décembre dernier ne titrait-il pas "A Paris, la rivalité Delanoë-Royal complique la formation des listes". Et en effet: "Dans [le XXème arrondissement, Bertrand Delanoë a souhaité voir figurer en position éligible un de ses conseillers à la mairie, Hamou Bouakkaz. Pour faire droit à cette demande du maire, la tête de liste strauss-khanienne dans le 20e , Frédérique Calandra, avait rétrogradé le sénateur David Assouline – proche de Mme Royal – à une place non éligible. Dénonçant "une petite exécution dans un sous-bois, à l'abri des regards", M. Assouline a obtenu le rejet de la liste par 106 voix contre 93". La recherche permanente de places met en danger un nombre grandissant d'éléphants.

Le braconnage: Le Figaro du 27 décembre ne s'en félicitait-il pas? "Le parti du président de la République a établi une liste de 500 candidats venus de la gauche ou du centre et veut «doubler la mise». La liste comporte cinq cents noms. C'est la liste de «l'ouverture politique» voulue par Nicolas Sarkozy et que l'UMP s'applique à mettre en œuvre dans les villes de plus de 30 000 habitants pour les municipales. Concoctée par Alain Marleix, le «M. Élections» du parti du président, elle fait la part belle à l'ouverture vers les candidats de gauche convertis au sarkozysme et à ceux issus de l'immigration. Le président de la République, qui a fait le point sur la question avant de partir en vacances, est satisfait mais en veut plus. Il compte sur sa stratégie d'ouverture pour passer sans encombre les rendez-vous électoraux du printemps". Jack Lang sera-t-il le prochain éléphant à y laisser ses défenses ?

La culture sur brulis: Manuel Valls, le député PS de l'Essonne, n'avait-il pas estimé le 15 juillet, lors du Grand Rendez-vous Europe 1/TV5 Monde/Le Parisien,qu'il serait souhaitable que le Parti socialiste "change de nom" et "dépoussière" son fonctionnement, sans attendre les municipales de 2008. "". Plus que de dépoussièrage, Manuel Valls propose de mettre le feu aux vieux combats, en appelant le PS à se prononcer avec « une plus grande clarté » en faveur de l'alignement des régimes spéciaux de retraite (Le monde du 12 décembre). Il est à craindre que l'incendie se propage sur toutes les terres de PS, «une grande partie des idées de gauche est épuisée», avait-il osé il y a quelques mois (Libération du 1er septembre).

Le buchonnage industriel: là, c'est du mastoque. On touche aux ressources. Le prédateur n'est pas n'importe qui. Nicolas Sarkozy, imself. Jugez-en vous mêmes: "Français, prompts à détester votre pays et son histoire, écoutez la grande voix de Jaurès: « Ce qu’il faut ce n’est pas juger toujours, juger tout le temps, c’est se demander d’époque en époque, de génération en génération, de quels moyens de vie disposaient les hommes, à quelles difficultés ils étaient en proie, quel était le péril ou la pesanteur de leur tâche, et rendre justice à chacun sous le fardeau. »Pourquoi la gauche n’entend-elle plus la voix de Jaurès ?" (Congrès de l'UMP, 14 janvier 2007). Je vous l'ai dit, du buchonnage ... jusqu'aux larmes tant l'émotion nous étreint: « J’ai cité Léon Blum parce que Léon Blum a fait de la France une grande nation quand il a dit : "l’émulation scolaire c’est l’égalité vraie". Parce que je me sens l’héritier de l’enfant qui en 1936 grâce aux congés payés jette sur la mer son premier regard émerveillé et entend prononcer pour la première fois le mot "vacances"» (Discours de NS à Saint Quentin le 25 janvier 2007).

La destruction des routes migratoires: La dernière université d'été du PS à la Rochelle n'at-elle pas été surtout marquée par l'abscence des principaux éléphants. Et puis, qui grimpe encore la roche de Solutré?

Enfin, le laxisme des autorités locales: Stéphane Le Foll, le bras droit de François Hollande l'avoue lui-même :« Chaque fois qu'il y a un sujet un peu compliqué, faute d'une volonté et d'une autorité à la tête du parti, nous sommes tout de suite en difficulté ». « C'est pire qu'un problème d'autorité. C'est un problème lié au respect des règles du PS », ajoute-t-il.
Michel Urvoy dans Ouest France résumait bien la situation, le 16 janvier dernier: "[L'] affaire européenne aura été triplement ravageuse. D'abord, elle rend les socialistes coresponsables d'un traité (de Lisbonne) moins intéressant - mais qu'ils vont majoritairement voter - que le projet initial de Constitution qu'ils ont contribué, en dépit d'une consultation interne favorable, à jeter aux orties. Ensuite, le PS se prend les pieds dans le tapis, alors que les municipales et le pouvoir d'achat commençaient à le rendre audible. Enfin, à quelques mois du congrès de la succession, François Hollande, arbitre inexistant des sujets qui fâchent, prend le risque d'une bataille généralisée sur le terrain. Les trois cas confirment que le PS est d'abord victime de son fonctionnement, de son leadership mou, de son incapacité à organiser des vraies confrontations et à faire respecter les décisions".

On le voit, la situation est préoccupante. Tous les indicateurs sont au rouge. Les éléphants risquent bien de disparaître. Pourtant, quand une espèce s'éteint, il arrive que quelques éléments survivent. Leur petite taille, leur étonnante potentiel d'adaptation, leur capacité à s'enterrer eux-mêmes.
Je vous en ai déterré un exemplaire.


lundi 21 janvier 2008

Foi de renard, le Point ne flagorne pas !
























Cette semaine, le Point a décidé d'être pointilleux. Le Point pointe. Il comptabilise, recense, énumère les petites révérences et grandes flagorneries de ce qu'il appelle la Cour de Nicolas Sarkozy. Mais, il en oublie. Et pas des moindres: les siennes...

Commençons par l’article de ce qui semble bien être un expert, le très Point-u Saïd Mahrane, p.33-34. Titre : « l’art de flagornerie ». La scène : « Mercredi 9 janvier, 18h30, salle des fêtes de l’Elysée. Un petit groupe de députés UMP, venus recevoir les voeux du président de la République, gesticulent entre deux tapisseries. Avec un air matois il s’attrapent par le bras et se font des messes basses. Très vite, on comprend qu’il s’agit pour eux de savoir par où Nicolas Sarkozy fera son entrée, histoire de se mettre sur son chemin et de lui toucher la main ».
Les acteurs : « Ils sont conseillers, ministres, hommes d’affaires, histrions du PAF, acteurs, journalistes. De droite, de gauche ou politiquement athées. Ils sont passés maîtres dans l’art de la flagornerie. Leur propre miroir ne les supporte plus. C’est la Cour. »
Suit un lourd descriptif de l'inutilité de cette cour tellement le Président semble s’en moquer. On sent que notre expert a du s’aider de Saint-Simon pour dresser portraits, user vocabulaire et décrire ainsi les vils procédés de ces flagorneurs.

Mais, il y a comme un problème. Une sorte de contradiction. Notre Point-ure du journalisme, p. 34, ne peut s’empêcher de flatter le séant de notre cher Président. Et là, on découvre l’expert, le vrai. Non pas celui qui sait voir dans l’oeil des autres les bassesses dont ils peuvent être les commetteurs. Mais l’expert en flagorneries. Lui-même. Car comment salir la Cour sans salir le Roi ? Il fallait se faire maître en la matière. Ce qu’ils n’aiment pas au Point, ce n’est pas la flagornerie, mais les flagorneurs, la concurrence quoi. Jugez-en par vous-mêmes. Un nota bene, en fin d’article : « les journalistes ne sont pas en reste. Il fallait voir Sarkozy à cheval en Camargue, durant la campagne présidentielle, tacquiner les joyeux journaleux qui le suivaient, amassés sur une remorque. Eux, hilares, en redemandaient. Lui jubilait. Ray-Ban sur le nez, beau comme Stallone. Ou était-ce Napoléon prenant la pose sur le col du Grand-Saint-Bernard... ? »

Cet article suscite donc dans mon esprit un Point d’interrogation. L’art de la flagornerie, puisqu’il existe, ne consisterait-il point à flétrir les autres pour mieux flatter soi-même ?. « L’habit ne fait pas le moine », dit une maxime. Mais « la plume refait l’oiseau », nous dit une autre. Et en feuilletant l’hebdomadaire, on s’aperçoit que la plume des journaleux refait plutôt bien l’oiseau Sarkozy. Et si c’est un art, c’est du Point-illisme, par petite touche par ci par là.

Petit manuel de détection de l’art de la flagornerie :

Point 1 – La flagornerie se cache dans la contradiction. Claude Imbert dans son éditorial, p.3. Intense réflexion sur la révolution en marche aux Etats-Unis qui voit le camp démocrate devoir choisir entre un Noir et une femme. Claude Imbert dit : « De cet Etat-continent, de ce peuple cosmopolite de Blancs, Noirs, Latinos et Jaunes monte d’ors et déjà une spectaculaire et forte vague de renouvellement et d’innovation ». Devant tant d’ouverture à l’autre, on se dit que le Claude aura du mal à soutenir la politique sarkozienne. Et bien non. Pourquoi se gêner? A la fin de l’éditorial : « Face aux nouveaux géants du monde, l’Europe n’a pas encore soigné les poisons dissolvants de son élargissement. Sarkozy, et tant mieux, a réparé la porcelaine atlantique. Sa « politique de civilisation » ne s’édifiera pas, loin de l’Amérique, dans l’amour irénique du genre humain. Une politique de civilisation doit d’abord protéger ce qui fait ce qu’elle est. Car le Mal court. Et contre lui nous sommes dans le même bateau ».

Point 2 – La flagornerie se cache dans la blague bravache. Patrick Besson, p.13 (« 24 conseils au président de la République en vue de ses noces avec Mademoiselle Bruni »). Entre autres : conseil n°23, « un tatouage pourrait lui plaire, mais éviter le piercing à la langue : vous parler quand même beaucoup ». No comment.

Point 3 – La flagornerie se cache dans la République. Sylvie Pierre-Brossolette, p. 31 et 32, nous narre le grand Charles croqué en Louis XIV par le Canard, « les courtisans à particule de VGE », « le bon plaisir mitterrandien », « la trinité Chirac ». Mais, nous dit-elle, avec Sarkozy, ce n’est pas pareil. « La seule différence de la cour de Nicolas 1er par rapport à celle de ses prédécesseurs, c’est sans doute l’inquiétude. (…) Aujourd’hui, [les courtisans] craignent de subir un moins, étreints par une anxiété paralysante, les puissants se sachant notés et jugés aux résultats ».

Point 4 – La flagornerie se cache dans la référence historique. Max Gallo, par ailleurs, rédacteur de discours de président, nous en convainc, p.40. « En fait nous changeons d’époque. Le rideau de l’hypocrisie et du mensonge social qui recouvrait la France puis le dernier tiers du XIXème siècle se déchire. Et cela gêne d’abord les élites compassionnelles. Elles dissimulent leur mode de vie et leurs revenus. Elles haïssent Sarkozy parce qu’il ose rompre avec l’hypocrisie bourgeoise, qu’il ne faut pas confondre avec la pudeur, la réserve, la discrétion, la retenue, l’humilité ». C'est sûr les élites du Point ne sont pas compassionnelles.

Point 5 – (Enfin) La flagornerie se cache dans des cercles concentriques (si, si, je vous jure). Marc Fumaroli de l’Académie française, p.42 (en face de la publicité pour le film sur Charlie Wilson). « Le prince démocratique contemporain n’a pas affaire à une seule cour, mais à la houle de trois cours concentriques [si j’ai bien suivi, celle des gens de pouvoir, celle des « petits espions de l’information, de la publicité et du divertissement de masse » et celle des « citoyens électeurs »]. S’il veut garder la ligne de conduite qu’il s’est fixé, il doit surfer sur ces trois houles à la fois, qui cherchent à le renverser en même temps qu’elles le portent. Il (ou elle) joue sans filet. L’exercice du pouvoir démocratique ne relève plus de l’art du théâtre, mais du sport à haut risque, du cirque, de la tauromachie ». Plus fort que Louis XIV. Je ne sais pas vous, mais là, j’ai le mal de mer.

En tout cas, une chose est certaine. Le Point a beau user de tous les stratagèmes pour nous faire croire qu’il ne mange pas de ce pain là, il semble bien qu’il en soit gavé.

Cette semaine, donc, un Point culminant d’hypocrisie...

samedi 19 janvier 2008

week end

Jacques Prévert, souvenir de Paris















"Le mot image veut dire ce qu'il veut dire, ce qu'on lui fait dire, aussi bien ce que les gens ont appelé une métaphore : c'est un mot un peu drôle, un peu savant, comme une figure ou un visage de rhétorique, toutes ces choses ont des noms ! Mais du moment qu'on écrit avec de l'encre ou un crayon, on peut faire des images aussi, surtout comme moi, quand on ne sait pas dessiner, on peut faire des images avec de la colle et des ciseaux, et c'est pareil qu'un texte, ça dit la même chose".
Jacques Prévert, cité in "Collages", Gallimard, Paris, 1982

vendredi 18 janvier 2008

panafieu, un temps de retard ...

... ou comment faire du vieux avec la Paneuf.

On le sait, la Droite aime bien les vieilles lunes.Lorsqu'on lit le programme de Françoise de Panafieu, pour les municipales à Paris en 2008, on constate très vite que la vieille lune s'appelle Jean Tibéri. Ce n'est pas étonnant quand on sait que la candidate de l'UMP a été cornaquée par l'ancien maire. C'est inquiétant quand on sait quel maire il a été. C'est guère engageant quand on sait qu'un programme, en principe, est fait pour nous projeter dans l'avenir et non 10 ou 15 ans en arrière...

Morceaux choisis.

Françoise de Panafieu dans 20 minutes (le 16 janvier): "J'engagerai la construction, sur la mandature, de 500 000 m² de surfaces de bureaux, à l'artisanat, aux locaux commerciaux et aux pépinières d'entreprises".

Or déjà, en 1996, Jean Tibéri faisait voté le projet Paris rive gauche se félicitant de lancer le "plus grand chantier d'Europe". Sur 130 hectares situés en bord de Seine, autour de la gare d’Austerlitz et de la Bibliothèque nationale de France, le plan d’aménagement prévoyait notamment la construction de 900.000 mètres carrés de bureaux, de locaux universitaires et d’environ 5.000 logements. Patrick-Olivier Picourt, élu de la majorité RPR-UDF au Conseil de Paris, déclarait même: « Haussman a bâti le Paris du XIXe siècle ; Jules Verne a rêvé Paris au XXe siècle ; nous allons bâtir le Paris du XXIe siècle. »

Bien, bien, bien. Poursuivons.

Françoise de Panafieu, toujours dans 20 minutes, le 16 janvier, développe ses priorités en matière de transports: "Je souhaite interdire l'accès de Paris et du périphérique aux véhicules polluants et aux camions, et que d'ici à 2014, seuls les véhicules répondant aux normes européennes soient autorisés à circuler dans la capitale".

Depuis longtemps, déjà, Paris envoie en banlieue, ses cimetieres, ses ordures, ses eaux usées, ses embouteillages. Désormais, elle y laissera la pollution. Le Grand Paris dont rêve Françoise dePanafieu ne consisterait-il pas à éloigner le plus possible Paris de sa banlieue? Encore et toujours en 1996 (une grande année, Tibéri venait d'arriver aux affaires ... municipales), l'Humanité dénoncait « la mise en place d’un dispositif dissuadant les automobilistes d’emprunter le périphérique aux heures de plein trafic [qui revenait] à exporter en banlieue les bouchons et les nuisances, et à reporter le trafic sur des voiries départementales et locales qui [n'étaient] pas conçues à cet effet. » Projet qui avait, du reste, réussi à obtenir l'opposition d'élus de toutes tendances, eXpliquait l'Humanité dans son édition du 12 décembre 1996.

Qu'on se rassure. Françoise de Panafieu à ses trucs à elle, des trucs qu'elle invente toute seule: un service d'action rapide propreté", par exemple.

Ah non, désolé, Jeannot y avait déjà pensé. Il appelait ça "Allo propreté".

Bon.

Que reste-t-il à la Droite quand elle n'a plus d'idées?
Jean, tu n'as pas d'idée?
Non?
Bon, on fait comme d'habitude, alors.

La sécurité, biensûr.

«De ses voyages à Londres, Françoise de Panafieu a ramené l'idée de l'installation de " 500 caméras par an " (soit 3000 à la fin de la mandature) dans Paris, " partout où cela est nécessaire ". Un investissement notable pour les Parisiens : (...) " 15 millions d'euros par an au total " précise le porte-parole de la candidate, Pierre-Yves Bournazel, à raison de " 20 000 euros l'unité en coût de fonctionnement ".», nous relate le Monde, du 17 janvier.

D'ailleurs, on ne parle plus de vidéo surveillance mais de vidéo tranquilité. Restons zen, et ne déprimons pas. Il y a d'autres candidats.

mardi 15 janvier 2008

25 mots


















Ce matin,
dans le métro,
je lis 20 minutes,
page 5:

25 mots

pour dire merde à 54,68 % des citoyens (15 450 279 citoyens) qui avaient dit non le 29 mai 2005.

25 mots

Au dos du journal, une publicité qui vient très opportunément. Je devais faire la tête du chien.
"On est toujours récompensé de sa fidélité", dit-elle.

Je me dis: "J'ai bien peur qu'il y ait quelques socialistes qui risquent d'être récompensés mais sans doute pas de la fidélité à leurs principes".

Petit rappel: proposition n°91 du Pacte présidentiel de Ségolène Royal:
"Négocier un traité institutionnel soumis à référendum pour que l'Europe fonctionne de manière plus démocratique et plus efficace".

Ailleurs on bourre les urnes ou on truque les résultats. En France, on ne compte même pas les bulletins.

lundi 14 janvier 2008

allo papa tango charlie *

« Tom Hanks s’engage dans la comédie politique ». Ainsi commence la page cinéma du Figaro de ce week-end. Poursuivons la lecture (rassurez vous je ne suis pas en train de vous imposer la lecture du journal), juste quelques lignes, histoire de savoir de quoi il en retourne :

« Costume et cravate sombres, il arrive, précédé d’un rire sonore dans la suite d’un palace parisien. Avec Tom Hanks, le contact est immédiat, la poignée de main chaleureuse. L’acteur aux deux oscars est de passage durant quelques heures dans la capitale pour parler de son nouveau film, une comédie politique dont il est le héros et le producteur. Dans "La Guerre selon Charlie Wilson", réalisé par son ami Mike Nichols, il incarne un député texan hors normes, noceur et buveur, qui se révéla un redoutable startège lors de l’invasion de l’Afghanistan par les troupes soviétiques ».

Et là, vint la phrase qui fit « tilt » dans mon mauvais esprit (maudite phrase) :

« J’aimerais bien qu’il y ait plus de politiciens de sa trempe », avoue aujourd’hui Tom Hanks.

Je me reporte, alors, fébrilement, à l’interview qui suit et je lis la confirmation de cette citation :
« J’aimerais qu’il y ait plus de politiciens de la veine de Charlie Wilson ! Des hommes qui osent, qui ont un discours direct, honnête ».

Le Figaro exulterait-il d’une telle déclaration ? Souscrirait-il à ce portrait de l’homme politique du XXIème siècle ?

Je dois vérifier. Je lis donc le reste du journal à la recherche d’autres Charlie Wilson. Et j’en trouve à la pelle.

Dans l’éditorial de Pierre Rousselin, tout d’abord, page 17, consacré à la libération des otages colombiennes, Charlie Wilson s’appelle Alvaro Uribe, le président très conservateur de la Colombie. En face de lui, des guérilleros « dépourvus de perspective politique » et un « extravagant président vénézuelien [qui se ] donne le beau rôle », profitant « sans vergogne » de la situation, « sa médiation [n’étant] utile que parce qu’il est le seul à soutenir les Farc [je le répète dépourvus de perspective politique], dont même Fidel Castro s’est distancé » [même Fidel]. Et bien, en face de tout ce ramassis de vieux révolutionnaires du XIXème siècle, Charlie Wilson alias Alvaro Uribe est là, lui, qui « avec élégance, (…) a surmonté sa méfiance pour féliciter Chavez ». Et, « il ne faut pas oublier que sans l’acquiescement et la collaboration de la Colombie, la libération de Clara Rojas et de Consuelo Gonzales n’aurait pas été possible, pas plus que celle, espérée, d’Ingrid Betancourt ». Un homme politique élégant qui ose surmonter sa méfiance, les Farc et Chavez.

Dans l’analyse de Philippe Gélie, ensuite, correspondant du Figaro à Washington, page 17 toujours, Charlie Wilson s’appelle, cette fois, George W. Bush. Analysant « comment George W. Bush a évolué sur le Proche-Orient sans trahir Israël », il nous explique que « celui qui avait pris [depuis dix ans] le contre-pied de ses prédecesseurs, rejetant non seulement l’approche volontariste de Bill Clinton mais aussi celle de son propre père, George H. W. Bush, organisateur de la conférence de Madrid en 1991, y a défendu des positions remarquablement proches de la posture américaine traditionnelle. Il y a parlé de "Palestine souveraine et indépendante", de "fin de l’occupation", de territoires "viables et contigus". Il y a critiqué les barrages militaires et les "entraves" israéliennes à la modernisation des forces de sécurité palestiniennes ». Voilà encore un homme qui ose, qui a un discours direct, désormais volontariste. Du Charlie Wilson tout craché ce George Walker.

Dans les pages politiques encore, à présent, Charlie Wilson se nomme Tony Blair, un « ex-premier ministre travailliste, [je cite l’article de Laure Mandeville, page 5] qui, se coulant dans les traces de Margaret Thatcher, mena en terre d’Albion [en terre d’Albion, il faut osé, quand même, quel homme !] la réforme de l’économie et de la société britannique dont rêve la droite de l’hexagone ». Tony Blair est « un homme de conviction récemment converti au catholicisme, qui ne renia jamais l’alliance du grand large avec l’Amérique et l’engagement britannique dans la guerre en Irak, malgré l’embourbement de ses troupes et l’effondrement de sa cote de popularité ». Catholique, donc honnête et droit. Solide face à l’adversité. Moi, je vous dis, Tony Blair ce n’est pas un Charlie Wilson mais deux à lui tout seul.

Bon.

Fort de cette démonstration, je reste toutefois quelqu’un qui sait écouté et je sais ce que vous allez me dire. « C’est tiré par les cheveux, des phrases sorties de leur contexte. Tout cela n’est pas très crédible. Il manque l’aventure, la chaire et les os, en somme. Car Charlie Wilson, ce n’est pas que du discours direct et honnête, c’est aussi des actes qui ont fait changé le cours de l’Histoire ».

Et vous avez raison.

Re-Figaro donc. Je remballe mes Blair, Bush et Uribe que j’ai trop tôt wilsonisés. Retour sur Charlie, page 30.

La présentation du film: « Farouche anticommuniste, ce baroudeur de Wilson réussit, avec l’aide d’une richissime Texane (interprétée par Julia Roberts) et d’un agent frondeur de la CIA (Philip Seymour Hoffman), à trouver des fonds à la Chambre des représentants pour financer la résistance des moudjahiddins contre l’Armée rouge. Mieux, pour leur fournir des armes, il noua une alliance improbable et secrète entre Israël, l’Egypte et le Pakistan. En 1989, six mois avant la chute du Mur de Berlin, les soldats russes quittaient l’Afghanistan ».
Et Jean Louis Turlin, correspondant du Figaro à New York, complète le portrait de Charlie en nous narrant un autre fait d’arme moins réussi dans lequel le sénateur Wilson ne « parvint pas à sauver le régime de Somoza au Nicaragua, malgré sa menace de voter contre le plan Carter de cession du canal de Panama si les Etats-Unis ne reprenaient pas leur aide au dictateur corrompu, mais en qui Wilson voyait un allié abandonné ». Turlin conclut tout de même : « A lui seul, [Wilson] a d’une certaine façon changé le cours de l’histoire, en bien dans l’immédiat, en mal à plus long terme, malgré lui : le départ des soviétiques a coïncidé avec l’arrêt de la manne américaine dans un pays à reconstruire. Les Talibans en ont profité pour combler le vide ».

Je résume : une jolie femme, un agent secret, une athmosphère de guerre froide. Et bien sûr, un homme qui ose, Charlie, un homme au discours honnête et direct.

Je désespère, où donc trouvé un Charlie Wilson crédible. Autant chercher un otage dans la jungle colombienne.


Et puis, je l’ai trouvé. Page 17, une fois de plus. C’est Alexandre Adler qui nous le livre. Dans sa chronique. « En ce début d'année 2008, le moral de la Russie est au beau fixe, et les relations franco-russes semblent l'être aussi. (…) Il semble que les relations entre Nicolas Sarkozy et Vladimir Poutine aient connu, de la même manière, une embellie certaine au fil des sommets où les deux chefs d'État se sont croisés ».

C'est désormais une évidence: Charlie Wilson s’appelle Nicolas Sarkozy et l’agent secret qui l’accompagne, Vladimir Poutine. Pour la jolie femme, Carla fera l’affaire.


Et tout colle.

Une atmosphère de guerre froide, un point chaud où se cristallisent l’opposition Est-ouest :
« La question diplomatique se résume en un mot : Kosovo. En apparence, rien de plus simple : plus de 90 % de la population, albanaise, est massée derrière un gouvernement d'union nationale qui souhaite proclamer l'indépendance le plus tôt possible. La communauté internationale a proposé un plan qui garantissait une certaine sécurité à la minorité serbe. Personne à Belgrade n'en veut. (…) Or la Russie a décidé, après de nombreuses humiliations dans les années 1990, de faire entendre son point de vue beaucoup plus fortement favorable à Belgrade. (…) Outre la Grèce à présent, Chypre, la Bulgarie et la Roumanie sont favorables au point de vue russe. »

La détente : « En politique intérieure, la situation générale est marquée par un net climat de détente depuis la désignation, comme successeur formel de Poutine, de l'actuel secrétaire général du Kremlin, Dimiti Medvedev, un universitaire notoirement non issu des rangs du KGB, et tout aussi notoirement libéral convaincu en matière économique comme en matière internationale ».

La volonté toutefois de défaire cette vieille URSS : « La situation, ici, rappelle, de manière troublante, l'époque de Khrouchtchev, lequel, de la même manière, avait fait le choix de la déstalinisation et n'avait rien trouvé de mieux que l'option d'une politique étrangère agressive, de Berlin-Est à Cuba, pour mieux jeter le trouble dans les rangs néostaliniens ».

Le bon coup qui vous retournerait l’histoire en moins de deux si Charlie sans mêlait : « Il faudrait convaincre Poutine rapidement de l'inanité d'une telle solution apparente, mais, en échange, armer son bras de quelques authentiques succès internationaux, dont il aura rudement besoin pour franchir un cap et s'attaquer aux archaïsmes russes les plus patents ».


Allez, Nicolas. Laisse tomber les kosovars, tchéthènes, néostaliniens de Caracas et de la jungle colombienne. Ton ami du KGB en vaut bien la peine. Et puis, comme l'a dit Charlie (le vrai): "On change le monde et puis on fout le camp et on fout en l'air la fin de partie". C'est drôle et sans risques.

Ils ne sont pas beaux nos hommes politiques qui osent, le discours direct, honnête.









mort schumann - allo papa tango charly

* collage du début d'article réalisé à partir des photos et articles du Figaro des 12 et 13 janvier 2008

samedi 12 janvier 2008

week end

Sergueï Paradjanov

Variations sur les thèmes de Pinturicchio et Raphaël (1986)

vendredi 11 janvier 2008

modèle anglais


Il est parfois utile de se demander, en regardant ce qui se fait ailleurs, ce que peuvent devenir les décisions que nos gouvernants prennent. L'occasion nous en est donné ces jours-ci au sujet du contrôle, sans cesse grandissant, sur les bénéficiaires de l'aide sociale, vous savez, ce fardeau de l'homme libéral.

Pour commencer, je reprend un passage d'un
article du journal Le Monde du 9 janvier 2007 qui reprend un papier de La Tribune.

«Le décret soumettant le bénéfice du revenu minimum d'insertion (RMI) "à une évaluation des biens et des éléments de train de vie" comme prévu dans la Loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) de 2007 "va paraître dans les prochains jours", annonce La Tribune dans son édition de mercredi 9 janvier. Le texte "s'appliquera au 1er janvier 2008, soit plus d'un an après le vote de la loi", précise le quotidien économique.

Rappelant que le RMI n'est jusqu'à présent "soumis qu'à condition de ressources", La Tribune explique que "le droit au RMI sera ainsi remis en cause lorsque le montant de l'évaluation atteindra ou dépassera la moitié du montant annuel du revenu minimum." "Les prestations familiales – prestation d'accueil au jeune enfant, complément familial, allocation de rentrée scolaire et allocation de parent isolé – et la CMU Complémentaire (CMU-C) seront soumises à la même procédure d'estimation du train de vie des bénéficiaires", est-il ajouté.»

Dans le droit fil des politiques libérales de nos amis les Grands Bretons, le gouvernement de la France qui a branché depuis plusieurs années son détecteur de conneries, continue l'installation de son régime de culpabilisation généralisée. "Mais bon, madame, vous comprenez, faut arrêter avec l'assistanat. Ca ne mène nulle part. Et pour dire les choses comme je les pense, il n'y a pas de chomeurs dans notre pays, il n'y a que des gens qui ne veulent pas travailler".

Bon. mais si les Englishs sont un modèle ce doit être parce qu'ils ont pris de l'avance en terme de "civilisation". TF1, jamais à cours de publicité pour ce genre de progrès, le 19 septembre 2007 déjà, évoquait dans un reportage de Catherine Jentile à Londres, l'exemple des détecteurs de mensonges destinés à vérifier les dires de ceux qui aiment rester au chaudmage. France 2 a fait le 5 décembre un sujet là dessus aussi mais je trouve celui de TF1 plus instructif. Cela dur 1 minutes 33 et ca vaut le coup:



On y détaille le processus de surveillance. Des opérateurs téléphoniques tentent de piéger les fraudeurs potentiels en commançant par des questions anodines (le rythme cardiaque du chomeur est alors normal. Vu qu'il dort tout le temps, ce n'est pas dur. Une question sur son code postal suffira) et enchaînant par des questions visant à le retourner. Le directeur du centre se félicite "3 mois, 200 fraudeurs, 170 000 euros".

Et Catherine Jentile de conclure par ces mots:

«Un projet qui, pour l'instant, en tout cas, ne sucite aucun débat ici. En effet, personne ne s'insurge contre l'utilisation des détecteurs de mensonges réservés jusqu'à présent aux délinquants et aux criminels»

Même si j'ai appris, petit, que la Grande Bretagne était réputée pour ses élevages de moutons, je m'étonne du «personne ne s'insurge».
Mais passons. Je m'attache plutôt aux derniers mots: «des détecteurs de mensonges réservés jusqu'à présent aux délinquants et aux criminels».

Et là, je vois Rachida Dati. Et son projet de loi dit" de rétention de sureté" qui consiste à garder en prison certains criminels [1], ce qui fait dire à Robert Badinter:

«Avec la loi nouvelle, le lien est rompu : il n'y a plus d'infraction commise, mais un diagnostic psychiatrique de « dangerosité », d'une prédisposition innée ou acquise à commettre des crimes. Que reste-t-il de la présomption d'innocence dans un tel système ? Après un siècle, nous voyons réapparaître le spectre de « l'homme dangereux » des positivistes italiens Lombroso et Ferri, et la conception d'un appareil judiciaire voué à diagnostiquer et traiter la dangerosité pénale. On sait à quelles dérives funestes cette approche a conduit le système répressif des Etats totalitaires». [2]

Alors, pour en revenir à notre histoire. Je fais un collage du modèle anglais et de Rachida Dati, des propos de Catherine Jentile et de Robert Badinter et je me dis que le temps n'est peut-être pas si loin qui verra un projet de loi proposer que l'on institue que tous les travailleurs, déjà chômeurs potentiels dans notre régime libéral, soient considérés comme des assassins des comptes publics. Et compte tenu de leur dangerosité et de leur prédisposition à l'oisiveté, le projet de loi établira alors qu'il n'est plus utile d'avoir d'assurance chômage, ni de quelconques allocations.

Et, le 9 janvier 2012, à la question de la journaliste «Souhaitez vous que 2012 soit la fin, au moins réelle, des systèmes d'allocations ?», Nicolas Sarkozy répondra: «pour dire les choses comme je les pense, oui ».


[1] voir article du
Monde du 7 janvier 2001
[2] Le Monde du 28 novembre 2007

jeudi 10 janvier 2008

la diversivie, c'est qui qui l'invente ?

Bon, aujourd’hui, à mon tour de déconner.

Quoique …

Cela faisait quelques jours que je n’avais pas pris le métro. C’est donc avec un esprit renouvelé et sans doute moins mécanique que je suis retourné sous terre ce matin. Je suis tombé nez à nez avec une campagne de pub qui s’affiche quasiment à toutes les stations de ma ligne.

Une campagne de publicité des Pays de la Loire. Vous savez cette sorte de région tampon entre la Bretagne et le reste de la France. Cette région qui souffre d’un terrible problème d’identité, qui a eu le malheur de grandir rejetée par ses camarades de classe, l’une se croyant toujours indépendante du monde, éprise de traditions, parlant langue ancienne et portant coiffes verticales, et l’autre se pensant toujours guide du bon goût, éprise d’absolu, parlant art et portant donjons de décoration. Au milieu, les Pays de la Loire font contraste, se croyant maîtres des spectacles en carton-pâte, épris de vitesse, parlant voiture et portant haut la gastronomie sauce rillettes.

Il fallait donc une bonne campagne de pub pour remonter tout cela. C’est fait depuis lundi.

Mais bon, vous pourrez le constater par vous-même, je l’ai trouvé un peu étrange. A côté de néologismes presque illisibles et de montages d’images approximatifs quoique parfois drôles (voir ci-dessus), un mot se répète, mi concept, mi slogan : la diversivie. Kesako ?, me direz vous. Et vous avez raison.

J’ai creusé donc. Sur le site du Conseil régional des Pays de la Loire, j’ai trouvé. Voici ce qui est écrit :

Diversivie

Néologisme XXIe s. Façon de vivre née de la philosophie « l’esprit grand ouvert de la région des Pays de Loire. Elle s’appuie sur ses valeurs : solidarité, volonté d’entreprendre, sens des équilibres et ouverture. Communauté de gens imaginatif, curieux, tournés vers l’avenir et qui préparent dès aujourd’hui toutes les solutions nécessaires à la vie de demain.
Diversivie (objectif) : révéler la « marque » Pays de Loire comme source d’attractivité économique et touristique auprès d’un cœur de cible de décideurs, prescripteurs nationaux, et renforcer la fierté d’appartenance au territoire auprès du grand public régional.
Diversivie (fonctionnement) : les outils média et hors média de la diversivie développent un imaginaire s’appuyant sur des réalités. Chaque affiche ou annonce représente la diversité de tous les territoires des Pays de Loire avec un visuel intégrant ses 5 départements. Chaque habitant de la région peut ainsi se retrouver dans cette communication et se l’approprier, comme tous ceux qui souhaiteraient s’y installer. Exemple : avec www.diversivie.com la Région crée un espace évolutif, le futur portail des passionnés de la Région.
Diversivie (en pratique) : Un maximum de visibilité et d’impact au niveau national, un « effet miroir » au niveau régional. Et de larges possibilités de déclinaisons pour déployer, dès 2008, des actions ciblées sur les champs de l’économie et du tourisme. En résumé, avec la Diversivie, la Région des Pays de Loire s’affirme comme l’une des mieux adaptées au monde de demain en affirmant son caractère et sa personnalité.


Façon de vivre née de la philosophie, sens des équilibres, communauté de gens imaginatifs, vie de demain, affirmer son caractère et sa personnalité. Mon esprit mal tourné, pas encore complètement métroboulotdodoïsé m’a fait associé Diversivie à Dianétique, le truc des scientologues. N’ayant peur de rien, j’ai continué à creuser. J’ai trouvé sur le site du machin un galimatias pour adeptes en mal d’identité.

La Dianétique vise à apporter à l’homme un nouvel état recherché depuis des siècles mais jamais atteint jusqu’alors. On l’appelle « Clair ». Un Clair est une personne débarrassée de son propre mental réactif. De ce fait, elle n’en subit plus les effets néfastes. (…) Devenir Clair renforce l’individualité et la créativité et n’amenuise en aucun cas les particularités individuelles. Un Clair est libre d’exprimer ses émotions, maître de ses pensées. Il peut vivre sans être encombré d’inhibitions dictées par les engrammes du passé. Sa créativité artistique, sa force de caractère et son originalité proviennent de sa personnalité fondamentale et non de son mental réactif. (…)
Voici quelques-unes des caractéristiques du Clair : Libéré des aberrations et des maladies psychosomatiques existantes ou potentielles ; autodéterminé ; énergique et persévérant ; libre d’exprimer ses sentiments ; ses perceptions, sa mémoire, son imagination, sa créativité et son esprit d’analyse atteignent un niveau bien supérieur à la moyenne ; équilibré et sain d’esprit ; ressent librement ses émotions ; prend plaisir à la vie ; moins enclin aux accidents ; en meilleure santé ; capable de raisonner et de réagir rapidement.
La joie de vivre et le bonheur sont l’apanage de l’état de Clair.


Et en Pays de la Loire, ce serait encore mieux…

Ah oui ! J’oubliais le mot de la fin. Vous avez vu la dernière couverture de Gala ?

mercredi 9 janvier 2008

martine aux etats-unis: lundi c'est blanc, mardi c'est noir

Con-tradiction

Voici une suite inattendue à ma note du 4 janvier...

Etrange contradiction d’un jour sur l’autre au journal de France 2 de David Pujadas. Lundi, Barack Obama n’est pas soutenu par la communauté noire. Mardi, elle retient son souffle, espérant sa victoire.

Je reproduis par écrit ci-dessous le contenu des reportages de Martine Laroche-Joubert qui ne sont disponibles que 7 jours sur le site de France 2. Je ne peux m’empêcher de faire quelques annotations…

Lundi 7 janvier, donc. C’est blanc.

Lancement par David Pujadas :
« Autre actualité de cette journée. Elle nous emmène aux Etats-Unis où le phénomène Barack Obama semble se confirmer. A la veille d’un nouveau vote dans le New Hampshire, il a pris le large dans les sondages face à Hillary Clinton. Tout peu bien sûr très vite changer mais c’est lui qui imprime le rythme et impose ses thèmes. Barack Obama a 46 ans. On parle beaucoup de lui depuis quelques jours, mais sans savoir qui il est. » (cela va, hélas, se vérifier)

Puis, vient le reportage de Martine Laroche Joubert qui évoque le « phénomène », le New Hampshire « a 78% blanc », l’ascension de Barack Obama depuis 2004 et son élection comme sénateur de l’Illinois. Elle termine par l’extrait suivant :

« Sa faiblesse : ses origines. Né d’une mère blanche du Kensas et d’un père universitaire kenyan, il peine à rassembler la communauté noire. Elle ne se reconnaît pas vraiment en lui. »

C’est retenu ?

Bien. On va s’endormir. Réveil-métro-boulot et de nouveau le toujours très sémillant David Pujadas mais, cette fois, on est le mardi 8 janvier. El là c'est noir.

Lancement de David Pujadas :
«C’est traditionnellement un petit hameau de campagne, Dixville Notch, qui ouvre le vote Il faut indiquer que le sénateur. Et Barack Obama a remporté 7 des 10 voix. »

(C’est plus fiable qu’un sondage Opinion Way, mais, quand même, on sent déjà que David a besoin de statistiques fiables pour assurer ses arrières)

Il continue :
« Il faut indiquer que le sénateur de l’Illinois n’a jamais insisté sur ses origines. Nous avons voulu savoir s’il y avait un vote communautaire. En clair, les Noirs Américains se reconnaissent-ils en lui ? »

Puis la toujours très déconnante Martine Laroche-Joubert reprend sa copie d’hier :
« A Harlem, la semaine dernière au théâtre de l’Apollo, temple de la musique noire, il est invité sans ferveur excessive. Certains se méfient de ses origines métisses, blanches par sa mère, kenyanes par son père. »

(Il semblerait que Martine aime bien ce club. Il semblerait également que c’est en abusant de whisky le dimanche 6 janvier, qu’elle a conclu que Barack Obama n’y était pas très populaire)

Après cette tentative, elle commence son mea culpa :
« Aujourd’hui, ses succès inattendus le font voir d’un autre œil »

Viennent les premiers témoignages, dans la rue :
1er témoignage : « C’est un afro américain mais je ne pense pas qu’il y ait une différence entre ceux qui sont noirs et ceux qui ne le sont pas assez. Sans doute, il est noir. »
2ème témoignage : « Je ne pensais pas qu’il avait une chance jusqu’à sa victoire dans l’Iowa, mais, peut-être que cela va changer maintenant ».

(Devant ces deux premiers échecs, Martine se dit qu’elle irait bien voir du côté de chez les Clinton. Elle aura peut-être plus de chance. Après tout elle s’attendait plutôt à une victoire d’Hillary Clinton. Non ?)

« Chez Sylvia, le restaurant favori de Bill Clinton (ses bureaux sont à côté), Barack Obama marque aussi des points. »
3ème témoignage : « Sa couleur de peau n’a pas d’importance. Pour moi, ce qui compte, c’est qu’il tienne ses promesses pour tout le monde ».
4ème témoignage : « Nous sommes encore dans une période de tensions raciales mais les temps changent et les esprits aussi. Ca peut évoluer. »
5ème témoignage : « Je n’ai jamais voté de ma vie, mais, cette fois, je vais voter pour Barack Obama. »

Elle capitule :
« Barack Obama ne fait pas campagne sur son identité, mais le pasteur Jessie Jackson est à côté. L’ancien secrétaire d’Etat Colin Powell se réjouit de ses succès. Aujourd’hui, la communauté noire retient son souffle. »

A demain Martine.

mardi 8 janvier 2008

oui, vous ne rêvez pas, madame de panafieu











Ce qui suit est une parodie du commentaire (à peine modifié) d'une photo publiée sur le site de campagne à la mairie de Paris de Françoise de Panafieu. [1]


«La scène se passe bien à Paris, à Montmartre dans le 18ème arrondissement, à l’heure de la prière. Les fidèles défilent jusque sur les passages cloutés. On n'a même pas pu mettre deux maigres barrières pour laisser passer les voitures ; c’est sans doute la communauté qui n'en avait pas les moyens.

Et cette scène se reproduit depuis plusieurs années.

Alors je pose la question ; cette image est-elle digne de Paris ?
Chacun le sait, ces fidèles n’ont pas choisi d’être là ; ils y sont parce qu’ils n’ont pas de lieu de culte. Ils ne savent même pas où poser leur statue. Une situation à la fois indigne pour eux et à la fois contraire au droit, puisque la voie publique est un espace laïc qui doit rester libre pour une vie de quartier normale.

Pour ma part, je dis clairement qu’une grande ville comme Paris doit permettre à chacun de pratiquer son culte dans la dignité, dans le strict respect des règles et des lois de notre pays. Paris doit être aussi la ville de la dignité et du respect. » [1]

Madame de Panafieu, s'il vous me lisez, faites en sorte s'il vous plait d'arrêter de faire du bruit et de semer de mauvaises odeurs à la veille d'un scrutin électoral. La laïcité s'en portera mieux.

Le mot de la fin à Jacques Chirac, votre mentor, bien sûr



[1] Pour consulter la version originale de Françoise de Panafieu, c'est ici.

lundi 7 janvier 2008

d'un dakar à l'autre

con-testé

Depuis quelques mois, on ne peut pas dire que la France soit à son aise en Afrique. L’ingérence des aventuriers de « l’arche de Zoé », tout d’abord, au Tchad. Depuis les années 60, France, Libye, Soudan, se disputent des frontières dessinées arbitrairement par la colonisation européenne qui voulait et a réussi ainsi à casser les anciens Etats sahéliens [1]. Les relations diplomatiques dégradées avec l’Algérie, ensuite, particulièrement visibles lors de la visite officielle de N. Sarkozy en décembre, signal de la perte d’influence de la France dans le Sahara. Ce sont aujourd’hui les Etats-Unis qui entraînent les troupes algériennes pour lutter contre Al Qaida dont le Sahel serait devenu une base arrière [2]. L’annulation du Paris-Dakar, enfin, suite aux menaces terroristes contre la course lors de ses étapes en Mauritanie où quatre touristes français ont trouvé la mort en décembre.

On peut donc s’interroger sur cette accumulation de déconvenues, qui ne datent pas de cette année d’ailleurs (souvenons nous des ridicules gesticulations de Dominique de Villepin et M. Alliot Marie en Côte d’Ivoire en 2006).
A l’heure où Nicolas Sarkozy nous sert sa douteuse « politique de civilisation » [3], on peut s’interroger si ce « Grand leader du monde contemporain », n’est pas en train de faire le con en notre nom en Afrique et sans doute ailleurs.
Pour s’en convaincre, comme d’habitude, regardons ses textes, en l’occurrence son discours prononcé à l’Université de Dakar le 26 juillet 2007. Où on devine comme le dit Edgar Morin (dont aurait grand tort d’assimiler les idées aux galimatias guaino-sarkozien), que Nicolas Sarkozy a « une vue tout à fait extérieure de la réalité africaine, [qu’] il n'a pas compris de l'intérieur les problèmes profonds de l'Afrique : ils sont liés à l'autonomie, à un progrès qui ne soit pas calqué sur le modèle de l'Occident, etc.… » [4].

Morceaux choisis où on retrouve les rengaines sarkozystes récurrentes [5]:

L’immobilisme c’est les autres

«Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'histoire. Le paysan africain, qui depuis des millénaires, vit avec les saisons, dont l'idéal de vie est d'être en harmonie avec la nature, ne connaît que l'éternel recommencement du temps rythmé par la répétition sans fin des mêmes gestes et des mêmes paroles. Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine, ni pour l'idée de progrès. Dans cet univers où la nature commande tout, l'homme échappe à l'angoisse de l'histoire qui tenaille l'homme moderne mais l'homme reste immobile au milieu d'un ordre immuable où tout semble être écrit d'avance. Jamais l'homme ne s'élance vers l'avenir. Jamais il ne lui vient à l'idée de sortir de la répétition pour s'inventer un destin.»

Le « fardeau de l’homme blanc » ou la supériorité de la civilisation européenne

«Le défi de l'Afrique, c'est d'apprendre à regarder son accession à l'universel non comme un reniement de ce qu'elle est mais comme un accomplissement. Le défi de l'Afrique, c'est d'apprendre à se sentir l'héritière de tout ce qu'il y a d'universel dans toutes les civilisations humaines. C'est de s'approprier les droits de l'homme, la démocratie, la liberté, l'égalité, la justice comme l'héritage commun de toutes les civilisations et de tous les hommes. C'est de s'approprier la science et la technique modernes comme le produit de toute l'intelligence humaine.»

«La faiblesse de l'Afrique qui a connu sur son sol tant de civilisations brillantes, ce fut longtemps de ne pas participer assez à ce grand métissage. Elle a payé cher, l'Afrique, ce désengagement du monde qui l'a rendue si vulnérable. Mais, de ses malheurs, l'Afrique a tiré une force nouvelle en se métissant à son tour. Ce métissage, quelles que fussent les conditions douloureuses de son avènement, est la vraie force et la vraie chance de l'Afrique au moment où émerge la première civilisation mondiale. La civilisation musulmane, la chrétienté, la colonisation, au-delà des crimes et des fautes qui furent commises en leur nom et qui ne sont pas excusables, ont ouvert les cœurs et les mentalités africaines à l'universel et à l'histoire. Ne vous laissez pas, jeunes d'Afrique, voler votre avenir par ceux qui ne savent opposer à l'intolérance que l'intolérance, au racisme que le racisme.»

L’hypocrisie


«Dès lors que vous regarderez bien en face la réalité de l'Afrique et que vous la prendrez à bras le corps, alors commencera la Renaissance africaine. Car le problème de l'Afrique, c'est qu'elle est devenue un mythe que chacun reconstruit pour les besoins de sa cause. Et ce mythe empêche de regarder en face la réalité de l'Afrique. La réalité de l'Afrique, c'est une démographie trop forte pour une croissance économique trop faible. La réalité de l'Afrique, c'est encore trop de famine, trop de misère. La réalité de l'Afrique, c'est la rareté qui suscite la violence. La réalité de l'Afrique, c'est le développement qui ne va pas assez vite, c'est l'agriculture qui ne produit pas assez, c'est le manque de routes, c'est le manque d'écoles, c'est le manque d'hôpitaux. La réalité de l'Afrique, c'est un grand gaspillage d'énergie, de courage, de talents, d'intelligence. La réalité de l'Afrique, c'est celle d'un grand continent qui a tout pour réussir et qui ne réussit pas parce qu'il n'arrive pas à se libérer de ses mythes.»

Ces dernières lignes notamment sont éloquentes. Je ne peux m’empêcher d’y lire implicitement que la réalité de l’Afrique, c’est qu’elle nous envoie trop d’enfants, c’est qu’elle est la cause de nos insécurités, c’est qu’elle manque de colonisation, c’est qu’elle ne se soumet pas encore assez à Total.

Que ce discours de Dakar finisse par s’échouer lamentablement dans les sables du « Dakar », ce n’est que bonnes choses, car avec de tels hommes politiques, aussi discrets et subtils que de gros 4x4, pour nous défendre en Afrique, nous n’avons rien à y faire, même pas du « tourisme durable ».


Le mot de la fin à la petite voix perdue dans le désert de Théodore Monod




[1] Pierre Conesa, « Les soubresauts d’un Etat fictif. Le Tchad des crises à répétition », Le Monde diplomatique, mai 2001. Un article de fond, un peu ancien mais qui fait un historique très instructif de l’histoire récente tourmentée de cette région.
[2] «L'annulation du Dakar révèle une insécurité croissante au Sahel», Le Monde du 5 janvier 2007
[3] « Alors, que la France montre la voie ! C’est ce que depuis toujours tous les peuples du monde attendent d’elle. C’est ce que nous ferons quand la France présidera, à partir du 1er juillet, l’Union Européenne. C’est ce que nous voulons faire avec l’Union pour la Méditerranée qui est un grand rêve de civilisation. C’est ce que nous voulons faire partout dans le monde pour redonner de l’espoir à ceux qui n’en n’ont plus. » Nicolas Sarkozy, vœux aux Français du 31 décembre 2007, voir ma note du 02 janvier).
[4] Edgar Morin, "La politique de civilisation ne doit pas être hypnotisée par la croissance", Le Monde du 3 janvier 2008

[5] Discours de Nicolas Sarkozy à l'Université de Dakar, 26 juillet 2007

samedi 5 janvier 2008

week end


vendredi 4 janvier 2008

chabadabada, chabadabada

con-tinuum

On sait que le journalisme grand public est devenu depuis quelques années une sous discipline des techniques de communication ou du marketing politique. Un homme, une femme est une bonne recette. Sarko, Ségo hier. Barack Obama, Hillary Clinton aujourd’hui.

A lire le feuilleton du 1er affrontement des primaires démocrates pour les élections américaines de novembre 2008, on sent bien que les mêmes concepts, les mêmes scénarios, les mêmes types de protagonistes utilisés dans le traitement de l’élection française nous sont resservis quelques mois plus tard pour nous narrer l’élection américaine.


Prenons, le journal le Monde du 4 janvier. L’éditorial comme mise en bouche. Le regain démocratique, d’abord. « Les électeurs de l'Iowa, (…) ont participé massivement, jeudi 3 janvier, aux votes sur les candidats républicains et démocrates à l'élection présidentielle de novembre ». Obama, ensuite, incarne la rupture, revendique ne pas appartenir à « l’establishment de Washington ». Hillary Clinton, enfin, « considérée il y a peu encore comme la candidate "inévitable" pour l'élection de novembre, a fait les frais du désir de renouvellement des électeurs démocrates, près de deux fois plus nombreux à voter qu'en 2004. »

Mais l’article de Corine Lesne, envoyée spéciale à Des Moines, nous replante le décor de ce qui serait, vue de France, une campagne électorale dans le pays de l'oncle Sam. Que du déjà lu, du déjà vu, du déjà entendu...

La « starisation » de la famille : « En montant sur scène, le 1er janvier, pour l'un de ses derniers meetings avant le vote des militants de l'Iowa, Barack Obama était accompagné de ses filles Malia et Sasha, 8 et 6 ans. " Les stars de la famille Obama, ce sont elles ", expliquait-il.»

Le contournement des partis : La candidature de Barack Obama « a galvanisé les militants, qui se sont approprié un processus largement tenu, jusqu'alors, par l'appareil du parti : 239.000 démocrates ont pris part au vote, soit presque deux fois plus qu'en 2004. L'afflux de jeunes lui a donné l'avantage. »

Une candidate qui aurait tort de se voir acquis le vote des femmes : « Alors que Mme Clinton avait beaucoup courtisé les femmes, elle n'a rassemblé que 30 % d'entre elles, contre 35 % pour M. Obama »

Une candidate qui voit dans sa défaite ses victoires futures : « " Hillary " n'a pas eu l'air le moins du monde affectée par sa défaite. (…) Elle s'est réjouie du succès des candidats démocrates. " Nous allons tout de suite emmener cet enthousiasme dans le New Hamsphire ", l'Etat où se déroulent des primaires le 8 janvier. »

Un candidat dont on avait raillé l’énergie à vouloir tout changer : « M. Obama a été l'événement de la campagne. " On nous disait que ce jour ne viendrait jamais, a-t-il lancé à ses partisans après la victoire. Que nous mettions la barre trop haut. Que ce pays était trop divisé… " »

Un candidat qui fait appel aux grandes figures de l’Histoire et qui ose l’ouverture : « Il y a moins d'un an qu'il a fait acte de candidature sur les marches du capitole de Springfield, la capitale de l'Illinois, en invoquant Abraham Lincoln. Il est devenu une référence, un candidat " transformationnel ", invoqué jusque dans les rangs adverses. »

Un candidat antisystème qui n’hésite pas à affronter les tenants de l’immobilisme : « il a réussi à se démarquer de Washington et des " maîtres d'un système cassé ". Il n'a pas le soutien de certains syndicats, qui ne croient pas à ses propositions consensuelles pour régler la question de l'assurance santé en partenariat avec l'industrie privée. »

Bref, le futur président d’un pays sans droite, ni gauche : « Depuis qu'il sait qu'il est en tête, il a ajouté, à ses critiques contre l'administration Bush et contre sa rivale démocrate, un projet de rassemblement. " Nous ne sommes pas une collection d'Etats rouges [républicains] et d'Etats bleus [démocrates],a-t-il proclamé jeudi. Nous sommes les Etats Unis d'Amérique. " »


On critique, on critique. Mais on est tous des midinettes...

Le mot de la fin à Claude Lelouch, donc.